dimanche 26 juin 2011

Perceptions du temps sur le scooter (partie I)

La pluie est l'ennemi juré lors des trajets en scooter. J'ai eu beaucoup de chance depuis que j'ai acheté celui-ci. J'ai été rarement surpris par les orages qui s'abattent sur l'île de Wallis et qui peuvent être particulièrement vigoureux. Je suis arrivé à la fin de la saison des pluies, mais il ne se passe quasiment pas une journée sans une averse. Je suis souvent passé entre les gouttes, soit que l'orage se termine avant que je ne m'élance, soit que les trombes d'eau ne se déversent qu'après mon arrivée à bon port.
Toutefois, à toute règle il faut des exceptions, j'ai été surpris par deux fois en pleine route par des rafales de pluie très violentes sur mon scooter. En quelques minutes, le ciel s'est obscurci, la pluie s'est précipitée sur moi comme un déluge. Les gouttes de pluie résonnaient sur le casque-tambour, elles se ruaient vers moi avec une violence inouïe, chacune d'entre elles devenait une petite flèche perçante qui pénétrait ma chair. Au delà de cette perception d'un corps criblé de piqûres, la sensation se double de la perte de la vision. La pluie saline tombe sur les yeux, elle irrite, brûle la cornée et brouille la vue. Seul remède : ralentir, ralentir pour éviter la chute ...

Le soleil peut se révéler un ennemi ou un ami, selon l'heure du jour. A midi, choc intense et insidieux sur la peau, puisque très souvent on ne le ressent pas sur le scooter en raison du vent rafraîchissant. Conséquence, rougeurs et coups de soleil, en particulier aux pieds car mes bras et mon visage se sont accoutumés à son ardeur.
Ami du promeneur, le soleil offre des spectacles extraordinaires. J'étais en route vers le sud, sur la RT 2, lorsque j'ai été le spectateur d'un magnifique coucher en fin d'après-midi. Malheureusement, la batterie de mon appareil de photo était toujours en berne. Les nuages extrêmement nombreux ce jour-là s'amoncelaient dans le ciel comme des vagues pétrifiées, un vaste réseau de flots blancs, gris, parfois noirs suspendu. Pourtant, le soleil perçait par endroits et les gerbes de lumière ont commencé à teindre les nuages de couleurs jaune clair, orange foncé. Quelques uns qui surplombaient les autres ont pris des teintes rouge sang, rouge éclatant, comme des langues de feu. Chacune de ces couleurs s'est entremêlée à l'autre, elles se sont exacerbées puis estompées sous l'effet de la lente montée de la nuit et de l'obscurité.

Sentiment très agréable, celui du vent qui souffle sur le visage, qui le palpe, qui le rafraîchit. Il s'immisce entre la lanière du casque et mes oreilles, souffle, siffle avec allégresse. Il frappe mes narines et gonfle ma poitrine, qui cingle dans l'air comme une vaste voile de bateau. Il s'introduit dans les manches de mes chemises, qui battent au vent comme des minuscules ailes à l'extrémité de mes épaules. J'éprouve le sentiment de la création d'une bulle d'air au fur et à mesure de l'accélération. Du guidon de scooter débordent à droite et à gauche, suspendus par une tige de métal, les deux rétroviseurs. J'y jette de temps en temps un coup d’œil, je vois le chemin parcouru, reflet de la route désormais dépassée  et reflet aussi de mon passé. Je continue à m'engouffrer dans l'air, épousant le vent, inscrivant inéluctablement ma route vers l'avant et laissant derrière moi la trace de mon sillon dans le temps ...

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