mardi 28 juin 2011

Perceptions du temps sur le scooter (partie II)

... Portés par le vent, les insectes  glissent sur moi ou me criblent de coups sur la poitrine, le visage, les bras. Lorsque je n'ai pas de lunettes (il m'arrive parfois de les oublier ici ou là ... serais-je distrait ?), ils peuvent se révéler dangereux, voire très douloureux. L'un d'eux est venu ainsi me heurter juste en dessous de l’œil gauche ; choc brutal et désagréable. Mais le pire était encore à venir... Je me rendais vers un supermarché un samedi matin lorsque subitement, je ressens une brûlure très vive, juste en dessous de la gorge, au dessus de  l'échancrure de mon T-shirt. Je freine brusquement, je m'arrête sur le rebord du chemin, je baisse les yeux, je vois une rougeur à l'endroit de l'impact. Je soulève très légèrement mon  T-shirt, une abeille, étourdie par le choc, a juste encore assez de force pour s'extraire de l'étoffe et s'envoler ... Je pense qu'elle m'avait fait l'offrande de son dard car la plaie a commencé à s'épaissir, gonfler légèrement et la souffrance s'est renforcée pendant quelques minutes, puis elle a diminué petit à petit fort heureusement.
Pour me venger de ces bestioles, je décide d'appliquer la loi du talion. Vous avez sans doute lu comme moi que pour préserver l'avenir de l'humanité et de la planète, il faudra consommer des insectes, je décide d'être précurseur dans ce domaine. J'ouvre grand la bouche, je happe au passage quelques moustiques, je les avale directement, j'extrais les protéines nécessaires à ma course vers l'avant, j'avance, j'avance ... Je scrute l'extrémité de mes épaules, je vois des ailes à peines perceptibles qui émergent, se forment lentement, j'en profite pour accélérer, je suis presque à 40 km/h. Je m'empare avec la langue des mouches qui volent frénétiquement autour du scooter, je les croque, les voici transformées en jus noirâtre et répugnant, tant pis, il faut continuer, j'avance, j'avance ... Mes ailes se sont fortifiées, battent avec plus d'énergie, je ressens une vigueur nouvelle, plus vite, plus vite, je dépasse les 60 km/h. J'attrape les abeilles qui vibrionnent autour de mon bolide, je leur dis : "Te souviens-tu ?", aucune d'elles ne se souvient, je détache avec les dents leur dard que je recrache, je broie leur chair, elle s'incorpore à la mienne, j'avance, j'avance ...  La fréquence de  mes battements d'ailes se précipite, me voilà au delà de 80 km/h. Mon appétit est devenu insatiable, me voilà à la poursuite des papillons, je saisis de mes lèvres, délicatement, leur chair, mais je sais que je ne dois pas m'attendrir devant leur grâce, leur beauté, je les engloutis, je ressens au passage le goût exaltant du nectar butiné sur les fleurs de Wallis et j'avance, j'avance ... Mes ailes se sont démesurément déployées, elles battent dans la fougue la plus démentielle, dans la volupté la plus intense, mille couleurs vives en illuminent la soie, je caresse, j'affleure la barrière des 100 km/h.

Enivré par la vitesse, je donne un léger coup de guidon à gauche, coté cœur, je percute violemment le véhicule qui me fait face. Mon scooter et moi culbutons de concert, je décris une trajectoire plus élevée grâce à mes ailes. Au cours de l'ascension qui me semble prendre les dimensions de l'éternité, je regarde en arrière, scrutant le présent de mon passé, depuis le lointain cocon de mes origines ... Je m'interroge : la courbe aurait-elle pu être divergente, aurais-je pu, aurais-je dû suivre d'autres chemins ? Je comprends que c'est impossible, que la courbe dessinée derrière soi, dont le souvenir déposé en nous inscrit sa marque dans chaque instant fugitif que l'on vit, est toujours inexorable, inaltérable, qu'on ne peut être toujours que soi, éloignez de moi les regrets, laissez moi saisir, laissez moi capter dans ma mémoire l'essentiel, les sourires et les joies ...

Au point culminant, je suis très exactement dans mon présent, qui coupe ma vie en deux.

Je vois alors le présent de mon futur, je contemple la courbe descendante qui me lie à ma fin. Est-elle proche, est-elle lointaine ? Demain ou dans cent ans, au regard des origines du monde, le temps que je passerai sur terre ne sera qu'un battement de cil dans l'Histoire. Il faudra continuer à être soi, écarter de sa vie toute plainte, toute amertume, tenter de vivre dans l'allégresse chaque jour, chaque heure, chaque seconde au rythme étourdissant des palpitations du cœur ...

Je cligne de l’œil, je retombe sur la selle de mon scooter, je lance mon cri de guerre "Hi-Han Hi-han" et je continue ma course ;-)

dimanche 26 juin 2011

Perceptions du temps sur le scooter (partie I)

La pluie est l'ennemi juré lors des trajets en scooter. J'ai eu beaucoup de chance depuis que j'ai acheté celui-ci. J'ai été rarement surpris par les orages qui s'abattent sur l'île de Wallis et qui peuvent être particulièrement vigoureux. Je suis arrivé à la fin de la saison des pluies, mais il ne se passe quasiment pas une journée sans une averse. Je suis souvent passé entre les gouttes, soit que l'orage se termine avant que je ne m'élance, soit que les trombes d'eau ne se déversent qu'après mon arrivée à bon port.
Toutefois, à toute règle il faut des exceptions, j'ai été surpris par deux fois en pleine route par des rafales de pluie très violentes sur mon scooter. En quelques minutes, le ciel s'est obscurci, la pluie s'est précipitée sur moi comme un déluge. Les gouttes de pluie résonnaient sur le casque-tambour, elles se ruaient vers moi avec une violence inouïe, chacune d'entre elles devenait une petite flèche perçante qui pénétrait ma chair. Au delà de cette perception d'un corps criblé de piqûres, la sensation se double de la perte de la vision. La pluie saline tombe sur les yeux, elle irrite, brûle la cornée et brouille la vue. Seul remède : ralentir, ralentir pour éviter la chute ...

Le soleil peut se révéler un ennemi ou un ami, selon l'heure du jour. A midi, choc intense et insidieux sur la peau, puisque très souvent on ne le ressent pas sur le scooter en raison du vent rafraîchissant. Conséquence, rougeurs et coups de soleil, en particulier aux pieds car mes bras et mon visage se sont accoutumés à son ardeur.
Ami du promeneur, le soleil offre des spectacles extraordinaires. J'étais en route vers le sud, sur la RT 2, lorsque j'ai été le spectateur d'un magnifique coucher en fin d'après-midi. Malheureusement, la batterie de mon appareil de photo était toujours en berne. Les nuages extrêmement nombreux ce jour-là s'amoncelaient dans le ciel comme des vagues pétrifiées, un vaste réseau de flots blancs, gris, parfois noirs suspendu. Pourtant, le soleil perçait par endroits et les gerbes de lumière ont commencé à teindre les nuages de couleurs jaune clair, orange foncé. Quelques uns qui surplombaient les autres ont pris des teintes rouge sang, rouge éclatant, comme des langues de feu. Chacune de ces couleurs s'est entremêlée à l'autre, elles se sont exacerbées puis estompées sous l'effet de la lente montée de la nuit et de l'obscurité.

Sentiment très agréable, celui du vent qui souffle sur le visage, qui le palpe, qui le rafraîchit. Il s'immisce entre la lanière du casque et mes oreilles, souffle, siffle avec allégresse. Il frappe mes narines et gonfle ma poitrine, qui cingle dans l'air comme une vaste voile de bateau. Il s'introduit dans les manches de mes chemises, qui battent au vent comme des minuscules ailes à l'extrémité de mes épaules. J'éprouve le sentiment de la création d'une bulle d'air au fur et à mesure de l'accélération. Du guidon de scooter débordent à droite et à gauche, suspendus par une tige de métal, les deux rétroviseurs. J'y jette de temps en temps un coup d’œil, je vois le chemin parcouru, reflet de la route désormais dépassée  et reflet aussi de mon passé. Je continue à m'engouffrer dans l'air, épousant le vent, inscrivant inéluctablement ma route vers l'avant et laissant derrière moi la trace de mon sillon dans le temps ...

jeudi 16 juin 2011

Journée du baptême de plongée : Fonds marins et Élévation

... Immersion totale dans l'eau ... Éclatement de bulles autour de moi, les miennes et celles de Catherine, rétrécissement total du champ de vision .... Je vois vaguement Catherine qui s'affaire à ma gauche, j'essaie de respirer, de m'enfoncer à l'aide de vigoureux coups de palmes, mais rien n'y fait, je reste sur place, malgré tous mes efforts. Je respire avec difficulté, je sens déjà ma gorge qui s'assèche, j'essaye de me calmer, d'inspirer ... d'expirer ... Catherine sort un kilo de plomb de son gilet et le met dans le mien. Et ça y est, je m'enfonce ... Si elle s'était trompée, si elle m'avait mis un kilo de plumes, serais-je revenu à la surface, me serais-je envolé tel un poisson volant ;-)

Elle me tient par la main, me guide, me tracte, j'avance à un rythme qui me semble être celui de la tortue. J'avance, j'avance... Je tourne la tête à droite, je suis à quelques centimètres d'un corail, explosion de couleurs bleues et vertes, je suis entouré d'une nuée de poissons-demoiselles ...


Poisson-demoiselle, naturellement timide et gracile

Les poissons-demoiselles sont les poissons les plus communs des récifs de Wallis. La robe de ces poissons de petite taille, souvent inférieure à 8 centimètres, est très colorée, à dominante bleue, parfois verte. Je les avais déjà vus grâce à mon masque quand je nageais en surface. Mais miraculeusement, me voilà au milieu d'eux, nous respirons de concert, mes bulles éclatent, se dirigent vers ces jeunes demoiselles. J'ai fait "Bouh, je suis le grand méchant loup !", les demoiselles s' enfuient, apeurées. Étant novice en plongée, je n'ai pu me lancer à leur poursuite ;-)

Petit à petit, mon champ de vision s'élargit, je peux contempler le récif corallien. Nous longeons celui-ci pendant un certain temps. Parfois le champ se rétrécit à nouveau, affairé que je suis à tenter de respirer, d'inspirer, d'expirer. Sensations nouvelles : monde de la lenteur, j'avance, j'avance au rythme de la tortue ; monde du silence, aucun bruit, sinon les bulles d'air qui s'échappent de moi, furtives, à intervalles réguliers. Catherine  m'interpelle fréquemment par un signe de la main, l'index et le pouce formant un petit "O". Je lui réponds par le même signe "Oh Oh, je vais bien". Elle me montre de la main un poisson perroquet non loin de là à ma droite, puis deux autres à ma gauche. Je les salue, mais j'évite d'entamer la conversation...


Hopla, salut, c'est encore moi
Hopla, salut, c'est encore moi


Nous nous approchons du récif, deux petites étoiles de mer gisent sur le sol, au milieu des concombres de mer. Catherine les touche, je n'ose pas le faire. Plus loin, une immense étoile de mer bleue qu'elle soulève, l'étoile semble inerte mais je perçois un léger mouvement, elle est bien vivante.

Petit à petit, il me semble que je commence à percevoir comment descendre dans l'eau, à maîtriser le mouvement d'inspiration et surtout d'expiration, qui permet de s'enfoncer. Je commence à m'étendre dans l'eau pour avancer. Tout à coup, la main de Catherine me désigne sur ma droite un immense coquillage, un bivalve. Elle l'effleure, il se referme instantanément, craignant un prédateur. Nous descendons, je regarde vers le fond du lagon qui devient de plus en plus sombre en s'enfonçant à plus de vingt mètres. Je regarde le haut, je perçois la vague lumière du jour qui parvient jusqu'à nous. Parfois je perds la maîtrise de ma respiration, je m'élève malgré moi, Catherine me réentraine vers le bas. Je regarde à ma gauche, trois gros poissons carangues, mesurant plus de 50 centimètres, filent vers les profondeurs.

C'est la fin, nous remontons lentement vers la surface. La lumière qui nous parvient s'étend au fur et à mesure de la remontée. Soudain, explosion de lumière ... Résurgence à l'air libre quand je sors la tête hors de l'eau. Dans mon esprit, c'est décidé, je dois goûter une nouvelle fois aux joies de la plongée. Je me dirige vers la plage, je sens à nouveau le poids du harnachement et du ciel sur mes épaules ...


Un poulpe rouge hors de l'eau

Entre midi et deux, repas offert par l'association. Maître Stanley, qui a le don d'ubiquité (Nuit blanche sur l'ilot Nukuteatea) nous gratifie de ses légendaires grillades. L'après-midi étant consacrée au niveau 1, j'en profite pour visiter l'ilot Nukutapu. En réalité, il est plus  connu sous le nom d'ilot Saint-Christophe, en raison d'un oratorio qui surplombe l'ilot et qui constitue un magnifique point de vue. Pour y parvenir, il faut d'abord atteindre un escalier qui se trouve à droite lorsqu'on aborde l'ilot. J'y suis allé avec Bilal, mais le chemin s'est avéré très dangereux. La marée était montante, je devais passer sur les rochers avec l'eau qui attaquait les mollets, alors que  les rochers étaient couverts de mousse, extrêmement glissants. Le mieux aurait été sans doute de nager au large, mais j'avais un appareil photo et je voulais le protéger. J'ai marché très lentement, à quatre pattes parfois, pour rejoindre les escaliers. Lente ascension pour rejoindre le sommet. Je m'arrête à mi-chemin, le paysage offert est magnifique. Et là, patatras, mon appareil photo que j'ai protégé contre vents, glissades et marées ne fonctionne pas, la batterie est sans doute déchargée... Tant pis, je fais contre mauvaise fortune bon coeur, je continue à monter. Je compte les marches, 50 ...100 ... 200... 275, 276 et 277, je suis au zénith, l'oratorio est effectivement somptueux. La statue de Saint-Christophe, avec Jésus sur son épaule droite, trône au milieu de ce sanctuaire. En face de la statue, nous dominons l'île de Wallis, qui semble si proche. Derrière la statue, sous un ciel bleu pâle, le Pacifique démesuré, incommensurable.

lundi 13 juin 2011

Journée du baptême de plongée : Préparatifs

Samedi 11 juin, jour du baptême de plongée avec l'association "Te U Hauhaulele". Journée attendue avec impatience car j'avais hâte d'essayer cette activité. Je suis arrivé le matin au local de l'association un peu en avance et là, zut, tête de linotte avait oublié les bottines de plage, indispensables à Wallis pour marcher sur les fonds marins parsemés de coraux. Je suis reparti très vite, roulant "à tombeau ouvert" pour aller les rechercher, le vent soufflant, sifflant dans mes oreilles comme un serpent. Je suis revenu, un peu en retard par rapport à l'heure de rendez-vous initial. Sur le chemin, le tombeau s'était refermé sans moi ;-)


Photo de groupe avant le départ...
Souriez, fromage ...

Nous sommes montés dans les voitures, direction une petite marina privée située au sud-ouest de l'île. Après la mise à l'eau de deux bateaux, l'embarquement des vivres et du matériel de plongée, direction l'ilot de Nukutapu. Nous étions répartis sur quatre bateaux et celui sur lequel j'avais pris place avec Catherine et Sophie semblait plutôt léger et frêle à première vue. Toutefois, l'esquif, équipé d'un moteur de  50 cv s'est révélé très vif. Sophie nous a demandé de nous mettre debout à l'avant, chacun d'un côté, et la vitesse de croisière rapidement atteinte m'a impressionné : le bateau jaillissait au dessus des vagues, les percutait, s'enfonçait parfois au creux de celles-ci pour bondir tel un cabri de plus en plus fréquemment et de plus en plus vite. Ralentissement progressif à quelques dizaines de mètres de l'îlot, jetée de l'ancre à l'avant et débarquement des affaires. Les bouteilles de plongée pesaient particulièrement lourd.

Bouteilles de plongée : inspirez... expirez ...

Nous partîmes quatre, mais par un prompt renfort, nous nous vîmes cinq en arrivant au port... Le cinquième bateau était composé d'une équipe de Wallis 1ère (ex RFO) qui souhaitait réaliser un reportage sur les activités de l'association et cette journée de baptême. L'équipe m'a interviewé, deux questions posées : Qu'est-ce qui vous a poussé à effectuer un baptême  de plongée ? Avez-vous une appréhension avant de plonger ? Apparemment, ils ont retenu la réponse à la deuxième question, d'après ce que m'en ont dit quelques amis, dans le reportage du JT du 11 juin (site Wallis 1ère - journal télévisé en haut à droite). Je n'ai pas pu voir celui-ci, je n'ai pas la télévision et ma liaison Internet de 256 Ko ne me permet pas de visualiser les vidéos.

La journée était consacrée à quatre baptêmes, mais aussi à l'obtention de la qualification de niveau 1 pour deux jeunes adolescents. Sophie, la présidente de l'association, leur a dispensé un petit cours. J'ai écouté de manière très distraite, il y a un temps pour toute chose sous les cieux, un temps pour le baptême et un temps pour le niveau 1 ...


Sophie en pleine explication

Je me suis reposé en faisant une petite sieste pendant la plongée consacrée au niveau 1. A partir de onze heures, le baptême a commencé. Le harnachement du plongeur, avec le gilet de plongée et la bouteille attachée à celui-ci, pèse d'un poids immense sur les épaules, comme si le ciel se tassait sur votre dos. Pour le baptême, vous êtes entièrement pris en charge par un responsable. La monitrice qui allait m'accompagner, Catherine, m'a donné les dernières consignes. Enfin, j'ai mordu l'embout qui me reliait à la bouteille d'air comprimé, et dents serrées, plongée dans les eaux profondes du lagon ...

Suite au prochain numéro : Vais-je ressortir vivant du lagon et vous narrer la suite de mes aventures ? ...


lundi 6 juin 2011

Allo Papa Tango Charlie

Je suis en train de préparer le certificat restreint de radiotéléphoniste (CRR). C'est une habilitation que l'on se doit de posséder pour utiliser une station radiotéléphonique dans un contexte de navigation maritime, mais également aéronautique. Je souhaite passer un permis bateau d'ici la fin de l'année et ce certificat permet d'avoir une équivalence pour un permis en métropole, une fois que l'on a acquis le permis bateau dans le Pacifique.
Pour l'obtenir, il faut répondre au niveau théorique à un questionnaire à choix multiples portant sur les procédures générales de sauvegarde de la vie humaine, sur l’électricité, la radiotéléphonie maritime, etc... Au niveau pratique, il faut se livrer au test de l'identification, puisque tout appel à la radio commence par une identification de la station appelée et appelante. L'alphabet phonétique international est nécessaire pour épeler correctement le nom de son bateau.
Je me suis rendu compte qu'avec l'âge, j'ai de plus en plus de mal à apprendre, à emmagasiner des choses nouvelles, le cerveau n'est plus une éponge. Je m'exerce alors à m'identifier pour retenir certaines lettres.

E comme Echo, écho, écho,..

R comme Roméo. Où est, où est ma Juliette ?

H comme Hôtel. J'ai habité mes demeures successives comme des hôtels, jamais propriétaire, toujours locataire. La propriété, c'est le vol, disait l'autre. J'ai été locataire, et je m'envole.

A comme Alpha, qui précède toujours Oméga, puisqu'il faut un début à tout et ce depuis le big bang.

N comme November, doux ou froid, c'est selon. Je suis déjà au début de l'automne de ma vie, novembre rôde non loin, mais laissez-moi encore un peu de temps.

Et je continue ainsi, choisissant les lettres qui me viennent au hasard de l'esprit.

P comme Papa, qui a quitté la demeure terrestre depuis plus de 20 ans. Sa chair est désormais poussière mais son esprit est en moi. L'esprit des êtres qui nous sont chers est éternel en nous, et mon cœur résonne, résonne à l'évocation de son nom.

T comme Tango, j'en ai dansé des milliers, à Strasbourg, Metz, Paris ou ailleurs. En position de danse classique ou milonguero, tête contre tête, et mon cœur en résonance.

C comme Charlie. Je scrute le nord, le sud, l'est, l'ouest. Je remue ciel et terre, je m'interroge ; où sont ses anges ? où sont mes anges ?

Allo Papa Tango Charlie
Allo Papa Tango Charlie
Répondez nous vous cherchons
Allo Papa Tango Charlie
Allo Papa Tango Charlie
Vous vous dirigez plein sud
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